On sait qu’il y a beaucoup de gaspillage de denrées alimentaires, mais a-t-on pu l’évaluer précisément ?
Une étude publiée récemment par des économistes anglais permet d’y voir un peu plus clair : ils estiment que la moitié de la nourriture produite sur notre planète n’est pas consommée. Or, elle a été produite et pour ce faire il a fallu mobiliser des ressources plus ou moins rares, telles que des terres agricoles, des semences, de l’énergie (pétrole, travail animal ou humain), des engrais, des transports, de l’eau, … etc. et tout cela pour un rendement de 50% ! Lamentable.
Sait-on les causes de cet invraisemblable gaspillage ?
Elles sont nombreuses comme le sont les responsables de cette situation : c’est le résultat du gaspillage des distributeurs et des consommateurs, mais aussi de mauvaises pratiques de production, de gestion, de stockage et de transport.
Jusqu’à la moitié de la nourriture produite au niveau mondial finit à la poubelle du fait d’une mauvaise moisson, de problèmes de stockage et des méthodes de transport, ainsi que du comportement irresponsable de nombreux distributeurs et consommateurs.
Donc tous coupables …
Oui, regardons d’abord le comportement du consommateur et des distributeurs, mais aussi le rôle parfois néfaste des réglementations.
Cette étude estime que trente pour cent de ce qui est récolté dans les champs n’atteint jamais le marché (et les distributeurs) du fait de la sélection qualité, et de la non-conformité à des critères purement esthétiques.
Et ceci parfois du fait de la réglementation : rappelle-toi qu’il y a trente ans les concombres étaient courbes … inadmissible pour les producteurs et distributeurs qui ont cherché à se procurer des concombres rectilignes, plus faciles à transporter, bien rangés dans leur cagette, que des concombres courbes dont le foisonnement était préjudiciable au rendement du transport
Alors on a réglementé la forme et la taille des concombres ? Comment et par qui ?
Les lobbys ont fini par arracher à la commission européenne une directive définissant les critères géométriques de commercialisation d’un concombre. D’où l’élimination, chez le producteur des concombres hors norme. Et ceci est valable aussi pour d’autres critères tels que l’absence de tavelures sur les pommes, la rotondité d’une tomate etc. Voilà pour les 30% qui ne sont même pas introduits sur le marché : heu, petit calcul, si ces produits étaient vendus ils permettraient de faire baisser de 20 à 25% le prix moyen de ces fruits et légumes.
Alors justement a-t-on idée du coût de ce gaspillage ?
Non, pas au niveau de la production, mais on a des idées assez précises du coût du gaspillage au niveau de la distribution et de la consommation. L’étude estime que 30 à 50% de ce qui est mis sur le marché n’est pas consommé. Bien sûr, il y a les épluchures, les noyaux, etc. mais il y a surtout notre comportement de consommateur et de la pression que nous exerçons sur les distributeurs. La conséquence serait que de 10 à 15 milliard d’euros de nourriture achetée seraient mis à la poubelle ! Quand on cherche du pouvoir d’achat … voilà une amélioration toute trouvée.
Quelles sont les raisons de ce gaspillage ?
D’abord une mauvaise interprétation des mentions « à consommer avant » telle date et « de préférence avant » telle date. On peut craindre que nombre de produits (je pense aux yaourts) sur lesquels figure une date limite de consommation soient encore comestibles plusieurs jours et semaines plus tard !
De même à quoi rime la mention « meilleur avant » telle date qui figure sur des boites de conserve qui bonifient en vieillissant ?
Ensuite le libre-service : en laissant le consommateur se servir, on encourage la manipulation à la recherche du plus beau fruit ou du plus mûr, de la salade la plus grosse, des carottes les plus droites, faciles à éplucher … : les moins beaux, les plus petits mais aussi tous les fruits et légumes qui ont été manipulés deviennent invendables et sont jetés.
Conclusions ?
Je n’ai pas encore parlé des gaspillages à la production au stockage, au transport, ni des effets de la spéculation sur la qualité des réserves, … ce sera l’objet d’une prochaine chronique mais déjà on peut affirmer que ces gaspillages sont une réelle tragédie qui ne peut pas continuer si nous voulons relever le défi consistant à satisfaire de manière durable les besoins futurs en nourriture de l’humanité.